Dans ma recherche, j’ai toujours utilisé l’art comme un outil de compréhension de la réalité dans laquelle je vis et dont je fais l’expérience, tout en essayant d’être consciente de la façon dont les autres êtres humains vivent et perçoivent leur environnement, et opèrent un changement. Cette action est toujours déterminée par une nécessité d’ordre politique ou sociale et souvent influencée par une période de détresse ou de crise.
Comment les gens réagissent-ils à une décision provenant du sommet et imposée à leur pays ? Quels sont leurs besoins et comment trouvent-ils des stratégies résilientes pour faire face à des changements inattendus ? Par exemple, et pour mentionner rapidement certaines de mes études de cas, on pourrait faire référence à la « New Town Operation » de Berlusconi après le tremblement de terre qui a eu lieu à L’Aquila en 2009 ; aux investissements de Benetton qui ont causé le déplacement de la communauté Mapuche en Patagonie ; au tourisme de masse et ses conséquences à long-termes sur la ville de Venise ; ou encore au phénomène de gentrification à San Francisco.
Dans le cas de « Performing the Self – the interview » j’interroge le cas très spécifique de la procédure de demande d’asile dans l’Europe contemporaine en collaboration avec l’experte du monde arabe et dramaturge Enrica Camporesi. Cette collaboration a débuté en 2008, lorsque nos chemins se sont croisés à Venise, où j’étudiais les arts visuels et elle la langue arabe et la littérature.
En 2010, j’ai rejoins Enrica au Liban où elle écrivait sa thèse sur le théâtre politique et l’historiographie contemporaine à Beyrouth. Je me rappelle par exemple nos discussions à propos de Rabi’ Mroue et de la méthodologie du Groupe Atlas. Egalement inspirée par le travail de Carlos Amorales, nous avons décidé d’expérimenter plus en profondeur l’équilibre sensible entre la réalité et la fiction sur la scène, tout en jouant avec les potentialités intrinsèques du témoignage oral et des documents historiographiques.
A partir de ce moment-là, les questions comme celles de la crédibilité, la fiabilité, la victimisation et la compassion, l’authenticité culturelle et les mécompréhensions interculturelles devinrent des thématiques décisives à explorer sur lesquelles nous avons réunis pendant cinq ans du matériel et des informations.
Puis, lorsqu’en 2015, Enrica s’est installée en Belgique, travaillant comme une professeur d’intégration sociale avec des demandeurs d’asile et réfugiés arabophones, nous avons décidé d’orienter nos recherches dans une performance s’appuyant sur un texte, une installation vidéo, et une publication.
« Performing the self – the interview » se concentre sur le rôle du témoignage oral en tant que moment de la recréation et de la représentation de la vérité individuelle, et zoome sur les figures de l’agent de protection et du demandeur d’asile, comme coproducteurs d’un nouveau récit de vie.